Cuisine et littérature : 8 extraits de classiques littéraires qui parlent de cuisine
Temps de lecture : 10 minutes
1) Quand la littérature parle de cuisine
2) Quand la littérature parle de chocolat
3) Quand la littérature parle de sandwich au poulet
4) Quand la littérature parle d’une volaille au four
5) Quand la littérature parle d’oignon
6) Quand la littérature parle d’huître
7) Quand la littérature parle de pain
8) Quand la littérature parle de gâteau mystérieux
9) Quand la littérature parle de madeleine
Quand la littérature parle de cuisine
Si la cuisine fait saliver, elle fait également écrire. Et j’en sais quelque chose : je suis passionnée par la cuisine mais également par la littérature! Mes chapitres préférés ? Ceux qui parlent de cuisine.
Lorsque l’on se régale avec un plat, il se passe quelque chose de physique qui mêle émotions et souvenirs : croquer dans un carré de chocolat ou encore humer les effluves d’un bouillon de volaille, autant de souvenirs et de sensations qui remontent ! Lire un texte qui décrit l’expérience d’un plat est doublement intéressant :
- On expérimente le plaisir de la dégustation : en lisant ces lignes, c’est presque comme si l’on goûtait nous-même à ces mets.
- On met des mots sur ces sensations difficiles à expliquer, qui relèvent de nos émotions, de nos souvenirs mais également de notre gourmandise.
J’ai choisi 8 passages de la littérature qui parlent de cuisine. Pour goûter au plaisir de la cuisine grâce à quelques lignes bien écrites. Pour chaque extrait, j’ai également ajouté une recette, au cas où la lecture vous donnerait l’envie d’y croquer pour de bon.
Quand la littérature parle de chocolat
La littérature : Charlie et la chocolaterie, Roald Dahl
"Tout cela, c'est du chocolat! Chaque goutte de cette rivière est du chocolat fondu, et du meilleur. Du chocolat de première qualité. Du chocolat, rien que du chocolat, de quoi remplir toutes les baignoires du pays! Et aussi toutes les piscines! N'est-ce pas magnifique? Et regardez mes tuyaux! Ils pompent le chocolat et le conduisent dans toutes les autres salles de l'usine! Des milliers et des milliers de litres!
Les enfants et les parents étaient bien trop ébahis pour pouvoir parler. Ils étaient confondus. Stupéfaits. Ahuris. Éblouis. Ils étaient subjugués par ce spectacle fantastique. Ils étaient là, les yeux ronds, sans dire un mot."
La recette de la cheffe Aurélie Collomb Clerc
Cet extrait de Charlie et la Chocolaterie de Roald Dahl rend bien compte de la fascination quasi universelle que produit le chocolat, chez les plus jeunes comme chez les grands ! Il décrit le chocolat comme une cascade, un paysage à couper le souffle. Et annonce le plaisir qui suit la dégustation… Pour plonger dans une cascade de chocolat à échelle de votre cuisine, lancez-vous dans la recette de ganache de la cheffe pâtissière Aurélie Collomb Clerc : à savourer sur une tartine, dans une tarte ou même pour accompagner quelques biscuits…
Le sandwich au poulet
La littérature : Boule de Suif, Guy de Maupassant
"Tous les regards étaient tendus vers elle. Puis l’odeur se répandit, élargissant les narines, faisant venir aux bouches une salive abondante avec une contraction douloureuse de la mâchoire sous les oreilles. Le mépris des dames pour cette fille devenait féroce, comme une envie de la tuer ou de la jeter en bas de la voiture, dans la neige, elle, sa timbale, son panier et ses provisions.
Mais Loiseau dévorait des yeux la terrine de poulet. Il dit : « À la bonne heure, madame a eu plus de précaution que nous. Il y a des personnes qui savent toujours penser à tout. » Elle leva la tête vers lui : « Si vous en désirez, monsieur ? C’est dur de jeûner depuis le matin. » Il salua : « Ma foi, franchement, je ne refuse pas (…) Il avait un journal qu’il étendit pour ne point tacher son pantalon, et sur la pointe d’un couteau toujours logé dans sa poche, il enleva une cuisse toute vernie de gelée, la dépeça des dents, puis la mâcha avec une satisfaction si évidente qu’il y eut dans la voiture un grand soupir de détresse."
La recette de la cheffe Sonia Ezgulian
Qui n’a jamais oublié son pique-nique dans le train et jalouse secrètement le festin déballé par son voisin ? Déjà au 19ème siècle, ces problématiques-là se retrouvaient : dans Boule de Suif, Maupassant décrit le mépris et le rejet de passagers envers une prostituée qui voyage avec eux. Et ce rejet commence dès le début du voyage, lorsqu’elle est la seule à avoir anticipé son repas… La prochaine fois que vous voyagez en train ou en voiture, préparez-vous la recette du sandwich aux restes de poulet, partagée par le cheffe Sonia Ezgulian : une recette délicieusement simple, facile à réaliser avec les restes du frigo, qui l’accompagne souvent dans ses nombreux trajets entre Lyon et Paris.
La volaille rôtie au four
La littérature : L’Ecume des jours, Boris vian
"Colin poussa la porte émaillée de la cuisine. Le cuisinier Nicolas surveillait son tableau de bord. Il était assis devant un pupitre également émaillé de jaune clair et qui portait des cadrans correspondant aux divers appareils culinaires alignés le long des murs. L'aiguille du four électrique, réglé pour la dinde rôtie, oscillait entre « presque » et « à point ». Il allait être temps de la retirer. Nicolas pressa un bouton vert, ce qui déclenchait le palpeur sensitif. Celui-ci pénétra sans rencontrer de résistance, et l'aiguille atteignit « à point » à ce moment. D'un geste rapide, Nicolas coupa le courant du four et mit en marche le chauffe-assiettes.
– Ce sera bon ? demanda Colin.
– Monsieur peut en être sûr, affirma Nicolas. La dinde était parfaitement calibrée."
La recette du chef Vivien Durand
La nécessité de la cuisson parfaite de la volaille, expliquée en un paragraphe par Boris Vian. Dans l’écume des jours, Nicolas est le très talentueux cuisinier de Colin. Il lui prépare des mets aussi inattendus que réussis. Pour atteindre cette exactitude de la cuisson de votre prochaine dinde, retrouvez le parcours dédié à la volaille du chef Vivien Durand. Il vous partage le secret pour réussir toutes vos recettes de volaille, au four, à la poêle ou encore en bouillon…
Les oignons
La littérature : Chocolat Amer, Laura Esquivel
"On raconte que Tita était tellement sensible que dans le ventre de mon arrière-grand-mère, elle pleurait quand celle-ci hachait des oignons. Elle pleurait si fort que Nacha, la cuisinière à moitié sourde de la maison, n’avait pas à tendre l’oreille pour l’entendre."
La recette de la cheffe Julia Sedefdjian
L’héroïne du roman de Laura Esquivel, Tita, est dotée d’un talent pour la cuisine, capable d’étranges pouvoirs sur ceux qui y goûtent. Et en particulier, celui qu’elle aime Pedro. Malgré son don de cuisinière, elle pleurait sur des oignons, déjà dans le ventre de sa mère. Si vous souhaitez tester votre sensibilité à l’oignon, une solution : la pissaladière. La plus jeune cheffe étoilée, Julia Sedefdjian, partage la recette de sa grand-mère niçoise. Une pâte à pain moelleuse et fondante, recouverte d’un délicieux confit d’oignon parfumé. Une très bonne raison de pleurer devant des oignons.
L’huître
La littérature : Le rat et l’huître, Jean de La Fontaine
"Parmi tant d’huîtres toutes closes
Une s'était ouverte; et, se bâillant au soleil,
Par un doux zéphir réjouie,
Humait l’air, respirait, était épanouie,
Blanche, grasse, et d’un goût, à la voir, nonpareil.
D’aussi loin que le Rat voit cette Huître qui bâille:
"Qu’aperçois-je, dit-il, c’est quelque victuaille;
Et, si je ne me trompe à la couleur du mets,
Je dois faire aujourd’hui bonne chère, ou jamais."
Là-dessus, maître Rat, plein de belle espérance,
Approche de l’écaille, allonge un peu le cou,
Se sent pris comme aux lacs; car l’Huître tout d’un coup
Se referme: et voilà ce que fait l’ignorance."
La recette du chef Ryan Milstein
Jean de La Fontaine connaissait manifestement le pouvoir qu’une huître peut avoir sur les gourmets. Dans cette fable, il décrit l’ignorance d’un rat un peu trop confiant, qui se croit savant mais se fait finalement surprendre par une huître. Si l’envie de goûter à l’huître vous prend, plongez-vous dans la recette du chef australien Ryan Milstein : il partage une recette traditionnelle d’huître chaude marinée de chez lui, où l’on savoure les huîtres en été (inversion du calendrier oblige), grillées sur un barbecue. (Cette recette se réalise évidemment sur la flamme d’une plaque ou à défaut, au four si vous n’êtes ni en été, ni équipé d’un barbecue.)
Le pain
La littérature : Le Pain, Francis Ponge
"La surface du pain est merveilleuse d'abord à cause de cette impression quasi panoramique qu'elle donne : comme si l'on avait à sa disposition sous la main les Alpes, le Taurus ou la Cordillère des Andes.
Ainsi donc une masse amorphe en train d'éructer fut glissée pour nous dans le four stellaire, où durcissant elle s'est façonnée en vallées, crêtes, ondulations, crevasses... Et tous ces plans dès lors si nettement articulés, ces dalles minces où la lumière avec application couche ses feux, - sans un regard pour la mollesse ignoble sous-jacente.
Ce lâche et froid sous-sol que l'on nomme la mie a son tissu pareil à celui des éponges : feuilles ou fleurs y sont comme des sœurs siamoises soudées par tous les coudes à la fois. Lorsque le pain rassit ces fleurs fanent et se rétrécissent : elles se détachent alors les unes des autres, et la masse en devient friable...
Mais brisons-la : car le pain doit être dans notre bouche moins objet de respect que de consommation."
La recette de la cheffe Sonia Ezgulian
Une description du pain à garder en tête (et à ne surtout pas ressortir à votre boulanger qui vous demande comment vous préférez votre baguette). Le pain fascine autant qu’il réunit : à l’apéro, pour savourer la fin de la sauce ou encore, pour accompagner un morceau fromage. Pour réaliser votre pain maison, c’est encore moins compliqué que d’écrire un poème : laissez-vous guider par la cheffe Sonia Ezgulian, qui partage sa recette de base du pain, déclinable à l’infini et idéale pour faire ses premiers pains maison.
Le gâteau mystérieux
La littérature : Alice au pays des merveilles, Lewis Carroll
"Bientôt son regard tomba sur une petite boîte d’ébène que l’on avait posée sous la table : elle l’ouvrit et trouva dedans un très petit gâteau sur lequel se trouvait posée une carte portant les mots MANGE-MOI magnifiquement imprimés en grands caractères. "Je vais le manger, se dit Alice ; s’il me fait grandir, je pourrai atteindre la clef ; et, s’il me fait rapetisser, je pourrai me glisser sous la porte ; donc, de toute façon, je pénétrerai dans le jardin, et, ensuite, advienne que pourra !"
Elle mangea un petit morceau de gâteau, et se demanda avec inquiétude : "Dans quel sens ? Dans quel sens ?" en tenant sa main posée sur sa tête pour savoir si elle grandissait ou rapetissait ; et elle fut toute surprise de constater qu’elle ne changeait pas de taille, certes, c’est là ce qui se produit généralement lorsqu’on mange un gâteau, mais Alice était tellement habituée à n’attendre que de l’extraordinaire, qu’il lui parut tout triste et tout stupide de devoir admettre qu’il ne se produisait rien d’anormal.
Elle se mit donc en devoir de dévorer le reste du gâteau."
La recette de la cheffe Marine Gora
Le gâteau décrit par Lewis Carroll dans Alice au pays de merveille fascine autant qu’il attire. Ses pouvoirs mystérieux et inconnus troublent la jeune Alice, qui tente désespérement de sortir de la pièce où elle est enfermée. Si vous êtes en quête de découverte et de sensations, la cheffe Marine Gora partage la recette de son carrot cake, tout simplement unique. Ingrédient par ingrédient, elle sélectionne un bouquet de saveur pour une dégustation parfaite : coco, cannelle, orange, carotte, muscade… Il faut en manger un morceau pour savoir ce qu’il se passera.
La madeleine
La littérature : Du côté de chez Swan, Marcel Proust
"Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines qui semblaient avoir été moulés dans la valve rainurée d’une coquille de Saint-Jacques. Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d’un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j’avais laissé s’amollir un morceau de madeleine.
Mais à l’instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d’extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m’avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m’avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu’opère l’amour, en me remplissant d’une essence précieuse (...)."
La recette de la cheffe Clémence Gommy : le financier
A chacun sa madeleine de Proust : un souvenir de notre enfance, aussi puissant qu’incompréhensiblement réconfortant (pour ma part, l’odeur du bocal de sucre parfumé aux gousses de vanille qui trônait dans la cuisine). Pour Marcel, c’est la madeleine qu’il trempait dans le thé. Cette empreinte physique le replonge instantanément dans le passé. Toujours pas de recette de madeleine sur Tchac (c’est évidemment dans les plans, rassurez-vous), mais une recette de financier proposé par la cheffe Clémence Gommy : le bon goût de beurre, la touche d’amande, léger comme un nuage, à déguster tiède et pourquoi pas accompagné d’un thé ?
Toutes ces recettes et techniques de chefs sont à retrouver sur Tchac.co, à partir de 2,99€.
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